lundi 7 juillet 2014

Le calendrier

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Hier j’ai fait le ménage de mon bureau. J’ai posé le calendrier en carton qui me tient lieu de sous-main sur la chaise, et j’ai passé le chiffon à poussière. Le calendrier a glissé à terre, le téléphone à sonné, j’ai décroché, papoté, oublié le calendrier. En raccrochant, j’ai fait deux pas en arrière, et j’ai marché sur le calendrier.
J’ai glissé, glissé, jusqu’à disparaître dans le calendrier. Je me suis retrouvée assise, le souffle coupé. J’étais dans une petite salle de cinéma. J’ai regardé autour de moi, il n’y avait qu’une vingtaine de sièges, et devant moi, une télécommande. J’ai appuyé au hasard, et je me suis retrouvée le 9 avril. Moment de bonheur, j’ai soufflé mes bougies, ouvert mes cadeaux, profité de ce doux moment de famille. Et puis, suite à un brusque geste, mon doigt a appuyé une touche : 17 janvier. J’ai revu toute cette journée. Je l’avais oubliée. Elle ressemblait tellement à tant d’autres jours semblables.  
J’ai eu froid d’un coup. Le tremblement que j’ai éprouvé m’a fait bondir et voila le 14 juin qui s’est affiché à l’écran. Le saut de 30 degrés a été un peu brutal. J’ai retiré mon tricot, et sous le soleil, j’ai examiné la télécommande avec attention.
La première rangée comportait les touches 1 à 31. La deuxième les 12 mois de l’année. Pour rire, j’ai tapé « 31 juin ». Un texte amusant est apparu à l’écran :
Le 31 juin, 
Je serai gentille avec tout le monde,
je finirai mon travail en retard,
Je ne dirai plus de gros mots,
Je ferai un régime sérieux.
Le 31 juin,
Je bouderai mes filles,
Je changerai de mari,
J’oublierai mes amis.
Le 31 juin,
De l’année prochaine…
Il était signé « Madame de K »
J’ai alors tenté d’autres expériences : le 14 juillet. Mais l’écran est resté noir. Quelle déception, je ne saurai donc pas si je pourrai participer au défilé du 14 juillet dans mon village ?
Et que dirait la télécommande si je cliquais sur un mois ? « Avril ». Une porte s’ouvrit sur le côté, et je vis apparaître un homme, drapé dans une toge, la tête couronnée de lilas. Vite, « Juillet ». Un autre homme le suivi, plus grand, la tête couronnée de roses. Vite, je cliquais sur tous les mois, les uns après les autres, chacun couronné selon sa saison. Mais qu’était-ce que ce boiteux qui claudiquait derrière les autres ? Il était gris, grincheux, petit, et grognait : « Vous pourriez m’attendre, j’étais avant vous. Et ce n’est pas parce que je suis le plus petit et que je boîte parce que j’ai une jambe de 28 et une autre de 29 que vous devez vous moquer de moi ».
Le mois de février, car c’était bien lui, râlait, pestait, grognait, grondait. Il se tourna vers moi, et me regarda d’un air féroce. J’empoignais la télécommande, et je cliquais sur « OFF ».
J’étais assise sur mon calendrier, ma tête avait cogné le coin de la table basse. Mais tout allait bien, j’allais pouvoir terminer mon ménage…

6 commentaires:

  1. Tu es une vraie Alice des TEMPS modernes.
    Ton texte onirique est passionnant, bravo !

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  2. J'aime.
    Je m'évade.
    Je rêve.
    Mais.... je me réveille et la réalité revient trop vite à mon gout.
    Merci en tout cas pour ce court moment d'évasion.

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  3. tu fais de bien drôle de rêves quand tue s dans les pommes!!! hihihihihihihi! merci pour le voyage!

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  4. J'avais déjà dit (sur l'écritoire) le bien que je pense de ce texte, et je recommence ici : un beau mélange souriant de réalisme et de fantaisie, bravo !

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  5. J'ai A-DO-RE, tu sors du registre habituel pour ce "défit" et c'est un régal de te lire !

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  6. Superbe! J'espère que tu n'as pas gardé de bosses...

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