- Grand-papa, raconte-nous encore l'histoire de cet arbre, s'il te plait.
L'enfant insistait, la grand-mère souriait, et le grand-père, sous un petit air bougon, faisait mine de résister pour avoir le plaisir d'entendre l'enfant insister encore et encore. Ce petit jeu se renouvelait périodiquement à chaque vacances estivales. La famille se réunissait dans la cour ombragée pour le goûter. Grand-maman sortait la limonade qu'elle avait elle-même confectionnée, ajoutait le gâteau moelleux. Parfois il y avait des glaces. Et toujours, grand-papa devait raconter. Il le faisait si bien, tout le monde l'écoutait avec plaisir. Bien sûr, il fallait toujours un peu le prier, les petits-enfants le faisaient de bonne grâce, sûrs que l'histoire n'en serait que plus belle. Une fois par été, donc, il fallait que grand-papa "raconte l'Arbre" selon les termes consacrés. Il changeait parfois un élément, ce qui provoquait immédiatement des hurlements : "Non, grand-papa, la Vrai Histoire".
"Lorsque la maison a été construite par mon père, le jardin n'était qu'un grand champ. Il a fait planter des arbres, les érables de l'allée, le verger, il a créer un beau jardin pour que ma mère puisse avoir des bouquets de fleurs fraîches toute l'année. Il a bien entendu installé un potager. Et puis, après une année passée dans cette belle maison, il s'est aperçu que le soleil de l'été serait trop fort pour pouvoir s'installer à l'extérieur. La meilleure ombre étant celle des arbres, il a trouvé des semences de tilleul, les a simplement mises en terre. Le plus amusant est qu'une des graines a germé et est sortie de terre le jour où je suis venu au monde. Mon père a alors choisi ce plant pour l'installer là où vous voyez l'arbre.
Le plant a poussé, moi aussi. Nous avons grandi ensemble. Papa me mesurait à mon arbre. Bien sûr, l'arbre a gagné. Tous les jours j'allais l'embrasser, j'essayais de grimper sur lui. Vous pensez bien qu'un arbre si frêle ne supportait pas bien mes tentatives de gymnastique. Mon père avait beau lui mettre des tuteurs pour qu'il pousse droit, il ne comprenait pas pourquoi le tronc de ce tilleul prenait des tournures fantaisistes. Il ne m'a jamais vu imprimer des torsions au jeune tronc. Je voulais pouvoir installer une cabane sur le tronc, et j'imaginais que je pourrai l'incliner à angle droit ! Fou que j'étais...
Lorsque mon père a compris de quelle façon je malmenais mon arbre, il était trop tard pour le redresser. C'est la raison pour laquelle il a aujourd'hui cette jolie forme. C'est la raison aussi pour laquelle j'ai acheté ce banc et que je l'ai posé à cet endroit : je m'y assied pour lire. L'arbre me donne son ombre, et moi je lui lis les meilleurs passages de mes livres, ou alors je lui raconte les histoires que je prépare pour vous. S'il aime mes histoires, il incline doucement ses branches vers moi, et je sais que je peux vous la narrer. S'il ne l'aime pas, il se redresse avec un petit air dédaigneux, et je sais que vous non plus vous n'aimerez pas mon histoire.
- Et celle-ci, grand-papa, l'arbre l'aime-t-il ?
- Regarde comme il fait frémir ses feuilles. C'est celle qu'il préfère."
Les vacances et l'arbre vous donnent à toutes l'inspiration.
RépondreSupprimerMême s'il a été malmené, cet arbre a bien su résister et pousser de jolie façon... et là, tout de suite, ses feuilles viennent de frémir ;-)
RépondreSupprimerDouce et tendre, ton histoire qui rassemble les générations me plait et me fait sourire ! on a envie de s'asseoir sur le banc ......
RépondreSupprimerQuel bonheur que d'avoir un arbre à soi ! Belle et tendre histoire d'une famille et d'une demeure. Tout ce que j'aime !
RépondreSupprimerBonnes vacances, Alphonsine ! Pour ma part je vais justement retrouver un fabuleux tilleul à plusieurs troncs dans le jardin de la maison d'été de Brunette !
Chez moi c'est un érable semé en même temps que notre aînée... Il a été malmené par les déménagements, mais depuis qu'il a sa place définitive il est majestueux.
Supprimerune maison de famille et un arbre au grand-père, ça sent bon chez toi ;-)
RépondreSupprimerLes grands-parents d'une amie avaient un marronnier dans une cour. Le grand-père était fantastique et racontait sa vie qui était comme un conte. Il y a des gens qui vivent intensément. Il m'a inspirée pour ce tableau !
SupprimerJolie poésie dans cette histoire ; j'adore ! L'arbre avec ses racines a su attiré les générations, les unes après les autres.
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