Faire lire un enfant, c'est un mode d'éducation, comme de les amener à la propreté (j'ai mal réussi sur ce point, parce que je ne m'y suis pas astreinte comme j'aurais dû. Mais bon, ils sont tous propres à ce jour).
Chaque cas a été un peu différent. A la base, mon mari et moi aimons beaucoup lire, nous lisons tous les jours, les enfants ont toujours été entourés de livres et nous ont vus lire. Donc, premier principe, il faut que les parents aiment lire pour donner le goût de la lecture, puisque l'éducation se fait principalement par l'exemple.
Accessoirement nous n'avons pas de télévision. Les enfants jouaient, lisaient, et nous sortions nous promener, visiter des musées... Avec le temps, des DVD sont venus occuper certaines soirées. Actuellement, il y a un ordinateur pour tous les enfants, avec accès très limité : pour aller sur Scolastance. Les seuls jeux vidéos sont ceux du site Légo ou Playmobil, mais uniquement le jour de l'anniversaire d'un des enfants ("Non, Augustin, tu n'iras pas sur le site Play le jour de MON anniversaire, les parents ne comptent pas").
Amélie, l'aînée, se refusait à mettre le nez dans un livre autre qu'un livre d'images. Un été, nous lui avons donné "La petite maison dans la prairie". Elle lisait une demie page, puis refermait le livre avec la mention "ce n'est pas intéressant"... jusqu'au jour où elle a été assise dans un fauteuil avec le livre et l'ordre de lire tout un chapitre avant de pouvoir jouer. Les cinq premiers jours ont été pénibles pour elle, les suivants ont été pénibles pour nous, parce qu'elle ne sortait plus de son livre... et quand on sait qu'il y a 6 tomes, on s'imagine bien la scène.
Conclusion numéro 1 : Il faut que l'enfant découvre la joie de lire en continu. S'il ne lit que quelques lignes, il ne se souvient pas forcément de ce qui précède, peine à rentrer dans l'histoire, et referme le livre avant même de connaître la suite. Le forcer à lire un chapitre en entier est donc le meilleur moyen pour qu'il comprenne que l'histoire forme un tout et devient intéressante lorsqu'elle est suivie.
Albert n'a pas eu besoin d'être aidé. Il a commencé sa carrière de grand lecteur lorsqu'il a lu le premier tome d'Harry Potter. Il y a des enfants qui aiment lire par nature. Et on les retrouve souvent dans les familles nombreuses, puisque c'est le moyen d'élection pour s'isoler des autres.
Conclusion numéro 2 : Peu importe LE livre qui détermine la lecture. Il faut avoir des étagères de livres à disposition (ou aller dans une bibliothèque), et surtout mettre devant lui les livres que son âge lui permettra de lire avec profit. (A l'époque, je lisais tous les livres pour enfants pour savoir à qui le recommander).
Antoinette a appris à lire très jeune, elle a toujours voulu faire comme les aînés, et c'est tout naturellement qu'elle a attrapé un livre pour avoir l'autorisation de lire au lieu d'éteindre la lumière et de dormir ! La lecture était considérée comme une récompense : celui qui savait lire avait le droit d'éteindre après les autres et de lire un temps donné (qui a évolué en fonction de l'âge). C'était très attractif.
Conclusion numéro 3 : Il faut que la lecture soit une récompense.
Anatole a également lu dans un objectif d'éteindre plus tard. Et comme il partageait sa chambre avec Albert, qu'il le voyait lire, il demandait des conseils de lecture à son frère qui a alors mis au point sa technique de chantage. (voir dans la rubrique "Ambroise")
Conclusion numéro 4 : La lecture se développe au contact d'autres lecteurs.
Ambroise a été l'enfant le plus récalcitrant à la lecture (au reste aussi d'ailleurs, c'est un peu un art développé chez lui que de lutter contre tout). Nous avons commencé avec le tome 1 de "la cabane magique". Ambroise n'a pas voulu le lire parce qu'il a trébuché sur la présentation de la première page. Je l'ai donc emporté en voiture "Non, maman, ce n'est pas la peine, je ne le lirai pas". Comme par hasard, je l'ai proposé en lecture à haute voix (les enfants lisaient beaucoup à haute voix dans la voiture, des livres adaptés à toute la famille, comme "le petit Nicolas" ou "la famille aux petits oignons", c'était excellent pour la diction et pour les fou-rires familiaux).
Nous avons lu trois chapitres (les enfants se passaient le livre), puis j'ai proposé d'arrêter. Ambroise a souhaité avoir la suite. Son frère a continué la lecture, mais s'est arrêté au chapitre sept, sous prétexte qu'il en avait assez. Il a posé le livre à côté d'Ambroise qui avait bien compris qu'il s'était fait avoir, mais qui était malgré tout trop curieux de connaître la suite. Il a terminé le livre tout seul... et m'a demandé les suivants.
Et c'est là qu'Alfred a mis au point sa technique de chantage : "Je te donne le tome deux de la cabane magique si tu lis un Fantômette" Je vous épargne les conversations, discussions, contestations, délibérations, objections, palabres et polémiques. Ambroise a lu un Fantômette en échange de quoi il a pu lire le tome deux de la cabane magique. Il a souhaité lire un autre Fantômette, mais Alfred le lui a interdit, à moins qu'il ne lise un club des cinq...
Conclusion numéro 5 : La lecture à haute voix suscite des lecteurs.
Conclusion numéro 6 : La lecture en voiture est un bon moyen pour faire aimer les livres.
Conclusion numéro 7 : Faire aimer un seul titre d'une série provoquera la lecture de tous les autres livres de la série.
Augustin est dysphasique, et a beaucoup de mal à lire des livres de son âge. Il est le seul a avoir eu le droit de se gaver de bandes dessinées. Mais contrairement aux autres, il lit tous les textes. Il connaît des répliques par cœur. Astérix, Tintin, Gaston Lagaffe et Achille Talon n'ont plus de secret pour lui.
Conclusion numéro 8 : Je croyais que la lecture des bandes dessinées était néfaste à la création d'un lecteur, je me suis trompée.
Six enfants, six techniques pour amener un enfant à aimer lire. N'hésitez pas à compléter cet article par vos commentaires.